Lors de plusieurs séjours à Buenos Aires, entre 2007 et 2009, Valérie Onnis et Daniel Darius ont collectionnés des impressions, des sons, des images, et des témoignages. Ces enregistrements constituent le matériel de leur première création de tango/danse contemporaine avec la compagnie Argos, en lien avec la grande crise économique et politique de 2001 en Argentine. Cette crise déclenche un déclin économique et social jusqu'alors inconnu dans un pays aussi développé que l'Argentine. La pauvrété s'empare des classes moyennes et l'on peut rencontrer désormais à Buenos un peuple de "cartoneros", condamnés à vivre dans la rue et à faire les tris des cartons et des matières recyclables pour gagner leur vie.
L'Argentine après la crise 2001. Un après-crise, individuel, politique, historique.
A l'intérieur on découvre avec le jour levant un espace recouvert de chaussures, comme un champ de bataille délaissé. La rumeur du monde social s’éloigne, sans nous quitter. Les grandes marches révolutionnaires et idéologiques du XXème siècle appartiennent désormais à un monde révolu.
Une femme et un homme ont échoués ici, vivant dans les vestiges d’un temps proche, mais disparu. C'est ici, dans l’espace perdu de l’intégrité sociale et de l’intimité, que tout serait à recommencer.
Errants dans les décombres, isolés l'un de l'autre, hantés par les images et les sons du passé, menacés par le néant, la femme et l'homme se mettent à l’abri de l’attente. Ebauchés, entrecoupés, fragiles, surgissent ce vide des mouvements, des danses, des tangos, comme autant de souvenirs, de fragments récoltés dans le champ de chaussures. Les chaussures ont gardé la mémoire des marches, des pas, des moments vécus, des utopies perdues…